Bilan de lecture préparé par Jacques Perron, C. 63
«
MARC LAURENDEAU, L'AMBASSADEUR »
J’ai lu avec beaucoup d’intérêt le livre que Marc Laurendeau (C.57) vient de publier, livre qui a été lancé le 2 novembre dernier, sous forme d’autobiographie.
Le lancement s’est tenu, je vous le donne en mille, à l’Arrière-scène de l’Esplanade Tranquille. Henri Tranquille (C.38), le célèbre libraire, aurait été fier que son nom, et la place nommée en son honneur, soient associés à l’événement, association que Marc Laurendeau n’a pas manqué de souligner dans son allocution, d’autant qu’il y avait été client à l’époque de ses études (pour les manuels scolaires usagés, m’a-t-il précisé).
Le livre, intitulé Marc Laurendeau, du rire cynique au regard journalistique, publié aux Éditions La Presse, fait une vingtaine de chapitres consacrés pour moitié à sa jeunesse, de sa petite enfance à la fin de l’aventure des Cyniques, et pour moitié à sa carrière dans les médias, que ce soit comme reporter, globe-trotter, journaliste, éditorialiste, chroniqueur et professeur, carrière qu’il poursuit encore aujourd’hui.
Les divers chapitres sont par ailleurs émaillés de portraits, courts mais précis, de ses collègues (les trois autres complices des Cyniques) et d’hommes publics qui l’ont marqué (Robert Bourrassa, René Lévesque, Jean Drapeau) et à qui il rend hommage. Cette galerie de portraits allège la lecture du bouquin qui fait quand même 341 pages.
Mais ce ne sont pas seulement ces pauses dans la trame chronologique qui rendent la lecture facile, mais aussi le style « Laurendeau » caractéristique que l’on retrouve au fil des pages. Des phrases courtes, des chutes rapides, des ellipses, des flash-back, un style inimitable forgé à la pratique de l’humour (avoir le sens du punch) et de son média de préférence que fut la radio où la voix, le ton et le rythme constituent l’essentiel de la relation avec cet auditoire privé d’écran. Bref, Laurendeau sait garder intact notre intérêt.
Je suis très loin de mon titre «L’Ambassadeur». Mais en cette année 2022 où le Collège Sainte-Marie a disparu depuis 53 ans, Marc Laurendeau s’en fait un porte-voix exceptionnel. J’ai relevé dans son livre près d’une trentaine de mentions du nom du Collège Sainte-Marie, sûrement un record absolu pour un ouvrage contemporain! J’en profite, au nom de l’Association, pour remercier Marc de cette notoriété renouvelée donnée à notre vieux collège.
D’autant que je souligne qu’il a bien capté et résumé l’enseignement du Sainte-Marie dans la formule suivante :
« La philosophie du Collège Sainte-Marie visait l’acquisition d’une formation et de savoirs sur des choses abstraites à appliquer plus tard sur des choses concrètes. » (page 48)
Laurendeau raconte qu’au décès prématuré de son père, il a même été boursier du collège, mais je ne crois pas que cela ait coloré le jugement qu’il porte sur les Jésuites du Québec en général quand il affirme :
« Les Jésuites faisaient malgré tout partie de l’avant-garde éclairée et parfois redoutée de cette société québécoise encore, dans son ensemble, sous la férule du clergé catholique ». (page 47)
Donc notre ambassadeur Laurendeau consacre un chapitre entier à son passage au Sainte-Marie (le chapitre 4) et un autre à sa fréquentation de l’amphithéâtre du Gesù (le chapitre 6). Il ne manque pas de souligner les anniversaires pour lesquels des événements spéciaux ont été tenus par l’Association : le spectacle du 150e en 1998, la soirée des Grands Noms et du lancement du livre Témoignages en 2019.
Pour le reste, le livre nous entraîne dans la vie politique et artistique des 60 dernières années au Québec dont la profession de Laurendeau en a fait un témoin privilégié. À cet égard, j’ai relevé, à l’index des noms cités, pas moins de 250 entrées! La fusion du bottin de l’Union des artistes et de celui des membres de la Fédération professionnelle des journalistes, quoi.
Et à l’égard de tous ces gens qu’il a croisés, toujours un bon mot, un commentaire flatteur, l’accent sur le côté positif de leur personnalité. Après le style éminemment incisif des Cyniques, Laurendeau pratique maintenant la pondération, au point où le lecteur peut se demander où, politiquement, il se tient. Il concède avoir été membre du Parti libéral au début de la Révolution Tranquille, avec des sympathies marquées pour le Parti québécois lors de sa création. On comprend que son métier l’obligeait par la suite à la plus grande neutralité.
Un indice : à la toute dernière page du livre, Laurendeau a cette phrase significative « Je ne laisse pas tomber l’espérance » (page 334) tout en citant Gaston Miron.
« Ça ne pourra pas toujours ne pas arriver,
nous entrerons là où nous sommes déjà. »
Outre d’être un excellent ambassadeur du collège, Laurendeau se révèle d’une grande finesse diplomatique dans son ouvrage. Aurait-il pu être le ministre des Affaires étrangères d’une République du Québec ou à tout le moins l’un de ses meilleurs ambassadeurs? Toujours est-il que ce livre demeure un incontournable pour tout ancien du Sainte-Marie.
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