Conventum 62
Les années de collège
Les années de collège, se souvenir de cela.
Un peu, encore.
Scruter le temps lointain, la mémoire
et ses méandres.
Les « jeunes années », comme on dit,
celles de la connaissance, des apprentissages.
Et cette « élite » future que nous sommes tous
alors,
apparemment, nous dit-on.
La crème de la crème !
Cet univers sans femme, des garçons et des hommes,
des… Pères, pour tout dire,
Jésuites de surcroît :
pellicules blanches sur soutanes noires !
Le préfet de discipline et le « père spirituel
»
qui nous enseignait les « mystères de la vie » !
Le premiers vendredis du mois au Gesù,
la photo de groupe dans le jardin, au début de l’année,
la cour de récréation, les tables de mississippi ;
les cours le samedi et les « retenues »,
les thèmes latins, les versions latines.
Les amitiés qui se nouent
et la trahison d'un ami, la blessure.
Ce professeur-là, de méthode, aimé de tous,
d’un amour adolescent, si vif, incisif.
Et les routiers, et le Bleu et Or emblématique.
L’odeur du bois et de la cire,
les longs couloirs de silence…
Le collège de ce temps-là, en garder la souvenance.
Un peu, encore. Se remémorer
pour rester fidèle
à soi, à sa jeunesse enfuie ;
aux autres aussi, les compagnons, les camarades
du temps révolu :
« Que sont mes amis devenus
Que j’avais de si près tenus… »
Voici le soir des retrouvailles.
Les jeunes hommes sont devenus des grands-pères.
Avec toujours, blotti en eux, le garçon de naguère,
dans les rides survenues et l’embonpoint pour certains.
Se souvenir de cela, le poème de Kipling :
« Si tu peux voir un jour…
et sans dire un seul mot, te mettre à rebâtir…
»
Revoir un moment cela : la cafétéria, la bibliothèque,
le Père « Tonneau » ventripotent,
la Guerre des Gaules et le…
« Quousque tandem abutere Catilina patientia nostra »
de Cicéron !
Se retrouver, ce soir, quelques-uns encore.
Nous, ceux-là de naguère. Ce conventum.
Se serrer la pince,
de vive voix.
Ou par le biais des mots adressés,
si proches, si lointains.
Serge Fisette, C. 62
|